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Le thé du Laos : un savoir-faire de tradition

Parmi le patrimoine culturel du Laos, le thé tient une place toute particulière. Traditionnellement planté et récolté dans le nord du pays, le thé lao est un « thé de forêt », il faut le ramasser au sommet des arbres sur lesquels les feuilles poussent. Le thé représente une ressource économique, sur laquelle plusieurs membres d’une même famille vivent. Pourtant, avec l’apparition du marché chinois, la culture du brûlis ou encore l’absence de structure de préservation, la filière du thé au Laos est fragilisée.


Le thé lao est un thé de tradition. Avant d’être consommées, les feuilles vertes sont ramassées en haut des arbres. De manière générale, le thé pousse sur des petits arbustes. Mais dans la région reculée de PHONGSALY, tout au Nord du Laos entre la Chine et le Vietnam, le thé pousse sur des arbres de trois ou quatre fois centenaires. Il y aurait au total jusqu’à 46 000 arbres de la sorte à 1183,5 mètres d’altitude en moyenne. Aujourd’hui, nous ne savons toujours pas si ces arbres ont poussé naturellement ou s’ils sont le résultat d’une plantation humaine. Cette particularité rend la mécanisation de la récolte quasi impossible. Le thé est uniquement exploité par des petits producteurs, souvent les membres d’une même famille, qui continuent patiemment de ramasser les feuilles de thé à la main, chaque jour et sans produit phytosanitaire. Ce sont 270 familles qui récolent le thé, soit environ 5 000 producteurs, et ce depuis près de 400 ans (1).


Une journée de travail peut rapporter entre 4 à 6 kilos de feuilles de thé, si ce n’est pas une dizaine de kilos pour les grands jours de récolte (aucune récolte n’est réalisée pendant la saison sèche, la récolte s'effectue entre mars et octobre). Une fois que le thé est récolté, les feuilles sont déposées dans une bassine en métal qui est chauffée afin de ramollir les feuilles. Elles sont ensuite roulées au moyen d’un cylindre en métal pour en extraire le jus. Les feuilles alors devenues brunes sont disposées au soleil afin de sécher.



Ce mode de récolte traditionnel permet de préserver la qualité des feuilles de thé et continue de faire vivre le patrimoine culturel du Laos. Cependant, c’est aussi ce qui fragilise le commerce du thé.


En effet ce patrimoine n’est pas préservé au niveau étatique, et les producteurs sont donc dépendants du marché. Or les deux tiers du marché du thé au Laos sont dirigés vers la Chine. Les Chinois achètent le thé lao qui est bien souvent meilleur que le thé chinois dont les feuilles sont très fréquemment traitées par des produits phytosanitaires qui altèrent la qualité des produits. Les Chinois achètent donc le thé lao, soit pour le consommer seul soit pour le couper avec le thé chinois. PHONGSALY représente 95% de la production de thé au Laos. Un autre obstacle qui favorise le marché chinois au marché lao, c'est le temps de transport. Depuis PHONGSALY, il faut bien trois jours de transports pour apporter les feuilles de thé à la capitale du pays, Vientiane (2). Les producteurs sont donc dépendants des demandes et des besoins du marché chinois.


Cependant sous l’effet de plusieurs programmes internationaux, les producteurs lao ont commencé à se réunir afin de faire front et de peser plus fort dans les négociations. Les agriculteurs commencent à s’organiser pour la production et dans les négociations afin de vendre leur thé au meilleur prix. L'objectif est de sortir les producteurs lao de cette dépendance au marché chinois dont ils dépendant et qui fragilisent le système économique de la province. C’est pourquoi il est important pour les agriculteurs de diversifier les acteurs du marché afin de stabiliser leur activité.


Afin de soutenir et de développer cette activité, plusieurs programmes internationaux interviennent dans la région de PHONGSALY. L’Agence Française de Développement (AFD) en coopération avec le Comité de Coopération Lao (CCL) ont lancé un programme de trois ans, de 2020 à 2023 afin de soutenir la filière du thé et de développer de façon durable cette activité par une structuration plus claire (3). L’objectif est d’aider à la mise en place d’une gestion durable des arbres de thé et une reconnaissance de la qualité des thés vendus. Et enfin, les familles productrices développent une organisation socio-économique plus stable et durable tout en augmentant leur capacité et compétence en préservant la tradition de la cueillette des feuilles.

La certification équitable et biologique pourrait permettre de diversifier le marché du thé qui est pour l’instant limité à la Chine en ouvrant le marché à la France. La production de thé elle-même sera soumise à de nouvelles normes pour une gestion éco-durable des forêts : il s’agit de diversifier les cultures et d’assurer un renforcement des compétences et de la résilience des populations faces aux changements climatiques, et réduire la pauvreté.


Maintenant que vous en savez un peu plus sur l'histoire et la situation économique actuel du thé lao, il est temps de se concentrer sur ses particularités gustatives qui font de lui un thé à part entière.

En comparaison avec les thés cultivés intensivement, les feuilles fraîches de thés sauvages ont jusqu’à 85% de plus de polyphénols et une richesse en nutriments plus importante (4) : cela en fait un thé avec des propriétés médicinales appréciées, notamment pour les problèmes de digestion. Ce qui explique aussi que ces thés ont une teneur en arômes beaucoup plus élevée que la normale. Les arbres pluri-centenaires ont des racines ancrées profondément dans le sol, l'arbre a accès à dune source de minéraux plus importante. Ces minéraux viennent enrichir le goût des feuilles de thé naturellement pour leur donner une saveur unique. Enfin, comme nous l’avons dit plus haut, la récolte exclusivement réalisée à la main préserve la qualité de la feuille de thé.

Dans la région de PHONGSALY, le thé récolté est du thé vert (5), mais il est possible de trouver quelques producteurs sur le plateau de BOLOGNE tout au Sud qui produisent du thé noir et du thé blanc.



  1. https://www.helvetas.org/fr/suisse/ce-que-vous-pouvez-faire/restez-a-l-ecoute/reportages-de-nos-projets/laos-the-sur-les-arbres

  2. https://www.afd.fr/fr/actualites/du-pour-lutter-contre-la-pauvrete-au-laos

  3. ibid

  4. https://intimithe.com/the-noir-nature/590-941-the-rare-phongsaly-laos-vieux-theiers.html

  5. https://www.palaisdesthes.com/fr/comprendre/pays/laos/



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